Quand la plainte d’un père pour soustraction d’enfant devient violence – Le Petit Journal

C’était probablement l’audience la plus attendue de la chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Montauban ce 6 janvier : une mère est accusée de soustraction d’enfant depuis le 27 juin 2018 par le père.
Ce délit est passible de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende dès lors que l’enfant est retenu au-delà de cinq jours sans que ceux qui ont le droit de réclamer qu’il leur soit représenté sachent où il se trouve.


Le père, partie civile n’est pas présent à l’audience ni représenté par son avocate.
La mère est bien là, contenant visiblement son émotion avec bien des efforts. Si elle a fui avec son enfant, c’est parce qu’elle avait peur de son mari et de sa violence, peur qu’il lui enlève son ls et qu’elle se sentait menacée y compris par des personnes tierces.


Nulle ne peut se faire justice elle-même.

La Présidente ne manque pas de lui rappeler que : « si vous estimez qu’il est mauvais père, il y a des moyens autres que de se faire justice soi-même ». Sauf qu’elle a bien tenté de bénécier d’une ordonnance de protection mais son époux ne s’est pas présenté à la convocation du Juge aux Affaires Familiales. A l’époque, femme au foyer, elle ne dispose d’aucun revenu propre pour engager
une procédure n’étant pas éligible à l’aide juridictionnelle calculée sur les revenus scaux du ménage, c’est-à-dire ceux de son mari.


Néanmoins, la Procureure arme « inconcevable de passer par sa seule analyse pour trouver une solution à un problème civil ou pénal » et déplore que par cette substitution d’enfant, cette mère se soit mise en faute. Toutefois, au regard du contexte de ce qui fut sa vie conjugale, elle requiert la condamnation symbolique de la mère avec dispense de peine.


Pour l’avocate de la mère, pas question d’une condamnation, même symbolique

Maître Isabelle Schoenacker-Rossi l’arme d’emblée : cette mère n’a pas tenté de soustraire son enfant au père mais elle l’a mis à l’abri de la violence.


Elle produit les certicats médicaux attestant des blessures, les attestations de recours de la mère à l’observatoire départemental des violences faites aux femmes et à la coordinatrice des violences intra-familiales de l’UDAF. Elle rappelle que pour se mettre à l’abri, la mère n’avait plus d’autre solution que de se faire héberger par un membre de sa famille résidant en Ile de France.
Sa cliente a désormais un emploi, un appartement où elle vit avec son fils. Elle a pu saisir un juge aux affaires familiales pour statuer sur l’autorité parentale. Dans le cadre de la procédure de divorce engagée, elle ne demande aucune pension alimentaire.


Surtout, maître Schoenacker-Rossi va démontrer que le père comme son avocate avaient connaissance de l’adresse de refuge de la mère alors même que le père a toujours prétendu l’ignorer tout comme il est avéré qu’il ne s’est jamais soucié de prendre des nouvelles de l’enfant. Il n’y a donc pas de délit de soustraction d’un enfant sans que le père ne sache où il se trouve.
Et l’avocate de conclure que la plainte du père contre la mère n’a été qu’une pression de plus pour faire violence sur sa femme. Elle demande donc la relaxe.


Une vie qui se reconstruit


La plaidoirie est saisissante : le soulagement de l’auditoire est perceptible et quelques sourires sont visibles avant même que la Présidente n’accède à la demande de relaxe.
Si la mère a toujours les yeux brillants d’émotion, c’est certainement le bonheur de savoir qu’elle va pouvoir reconstruire sa vie sereinement avec son fils.
VIC
Publié dans Tarn et Garonne Thématiques : Justice

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